Sonya Yoncheva : « Desdemona est une femme forte, qui sait exactement ce qu’elle est en train de faire. C’est pour cela que j’arrive à la comprendre, je crois, dans une mesure assez intime. Moi, je trouve qu’elle est courageuse ! Parce que c’est une fille qui aime quelqu’un qui est complètement différent d’elle, de sa mentalité, de sa société, de son temps. Sa plus grande force, c’est l’amour qu’elle ressent pour Otello. Cet amour est tellement pur qu’il est intouchable. Elle a fait tout ce qu’il fallait. Elle a défendu son amour, son homme, jusqu‘à la fin ».
Yannick Nézet-Séguin : « Otello c’est parfait, ni plus ni moins. C’est l’apogée de l‘œuvre de Verdi. Avec Otello, chaque rythme, chaque note, chaque silence, est parfait. L’orchestration, que Verdi voulait très moderne, se démarque de ce qu’il y avait avant, et rend la trame orchestrale ininterrompue. Même quand l’orchestre ne joue pas, on sent qu’il joue encore. C’est comme une grande symphonie chantée, tout ça est parfait ».
Sonya Yoncheva : « Le rôle est écrit pour une soprano lyrique typique, mais Verdi a poussé cette soprano dans les extrêmes graves de notre registre. Comment mélanger ces magnifiques aigües du IV Acte avec « esterrefatta fisso », avec tous ces sons poitrinés ? Pour moi, je dois dire que ce n’est pas si difficile parce que dans une vie précédente, j‘étais une contralte, donc je sens une énorme satisfaction à aller chanter là, en bas, et d’utiliser mes résonances de poitrine et de m’exprimer avec cette voix un peu « rude ».
Yannick Nézet-Séguin : si Giuseppe Verdi était là en 2015 je voudrais lui dire : réalisez-vous, Maestro, ce que vous avez apporté au monde ? Parce que Verdi n’avait pas du tout cette conscience. Verdi doutait, doutait… Je voudrais seulement l’assoir et lui dire combien on l’aime ! »
Sonya Yoncheva : « En réalité, j’apparais comme une femme très forte, je me sens obligée d‘être forte et déterminée, mais je suis quelqu’un de vulnérable, qui a beaucoup de doutes. Les sentiments peuvent parfois me tuer, comme Desdemone. réalisez-vous, Maestro, ce que vous avez apporté au monde ? »