Dans cette édition de Musica, nous rencontrons l'un des plus grands violonistes de notre temps : Leonidas Kavakos. Le virtuose grec au timbre unique et à la technique irréprochable a interprété au Luxembourg, l'extraordinaire concerto pour violon de Stravinsky.
L'accord complexe qui ouvre chaque mouvement et s'étend sur deux octaves et demi était qualifié par Igor Stravinsky lui-même de « passeport pour son concerto. » Son chef-d'oeuvre datant de 1931 et aux influences baroques est une source d'inspiration pour le violoniste grec Leonidas Kavakos. Il l'a récemment interprété aux côtés de l'Orchestre Philharmonique du Luxembourg. « Le son de cet accord reflète parfaitement le sens de l'humour de Stravinsky, son sarcasme, son ironie et la manière dont il s'amuse avec la musique », estime le virtuose avant d'évoquer ce qu'il aime particulièrement chez Stravinsky : « C'est le fait qu'il ait le regard tourné vers l'avenir et qu'en même temps, il distille toute l'énergie et la puissance du passé. »
Gustavo Gimeno, directeur musical de l'Orchestre Philharmonique, renchérit : « Il est évident que cela fait partie de la personnalité de Stravinsky : toutes ces couleurs, ces harmonies, cette tension, cette exploration des limites. » Leonidas Kavakos ajoute : « Plus on joue cette œuvre, plus on a une chance de s'approcher de ce qui fait son essence. Mais je ne devrais pas dire cela parce que je suis sûr que si je la joue dans cinq ans, je penserai à aujourd'hui en me disant : 'J'étais si loin à l'époque' et je continuerai de penser que je m'en approche, c'est toujours comme cela », confie-t-il. « Et ce concerto nous montre aussi combien il y a de sagesse et de génie dans ces partitions », assure le violoniste.
Leonidas Kavakos a acquis l'an dernier un précieux Stradivarius qu'il avait croisé sur sa route il y a plus de vingt ans. Ce qui lui a offert une nouvelle palette de couleurs sonores. « Quand vous trouvez quelque chose qui vous correspond, qui a les couleurs que vous recherchez, c'est non seulement une source de nouvelles connaissances, mais c'est surtout une source d'influence et d'inspiration parce que l'instrument a une telle personnalité et une telle richesse », se réjouit-il.
« Immédiatement, il fait naître en vous, de nouvelles idées parce que vous entendez des choses que vous n'avez jamais entendues », souligne-t-il. Autre influence pour le musicien d'origine grecque : la philosophie. « Par exemple, quand je lis le premier dialogue de Platon - « L'Ion » - où il dit que nous devrions interpréter l'esprit du poète plutôt que ses mots, je me dis que c'est exactement ce que nous recherchons quand nous jouons ou nous étudions une composition musicale," fait-il remarquer avant de conclure : « Nous n'essayons pas uniquement de jouer les notes, nous devons trouver ce qu'il y a derrière ces notes. »