Né à Berlin en 1929, Christoph von Dohnányi a progressivement construit une carrière à la hauteur de son talent rare et exigeant. Loin des lumières rapidement acquises, Dohnányi se soumet aux exigences de l'opéra où il acquiert un métier d'une sûreté et d'une précision inégalables. Sa famille, riche d'une tradition musicale forte (son grand-père, Ernst von Dohnányi, est un pianiste et compositeur renommé proche de Bartók et professeur de Solti), l'initie à la musique.
Malgré cette ascendance prestigieuse, Dohnányi ne choisit pas d'emblée la voie musicale. La guerre, tout d'abord, atteint profondément le jeune homme qui voit son père assassiné par les nazis. Mais après quelques études de droit, l'exemple de Solti replace Dohnányi vers le chemin des sons. Suivent deux rencontres déterminantes : Dohnányi reçoit les conseils de Ferenc Fricsay puis, en 1952, rencontre Leonard Bernstein à Tanglewood.
S'amorce un apprentissage minutieux du métier. En 1957, Christoph von Dohnányi est tout d'abord nommé directeur musical à Lübeck. Suivent des responsabilités à Cassel (1963), à Francfort (en 1968), à l'opéra de Hambourg en 1975. Il devient ensuite Directeur musical de Cleveland en 1984. En 2004, il est désigné chef permanent de l'Opéra national de Paris. Loin de se laisser dicter ses répertoires, Dohnányi se confronte aux oeuvres difficiles de son temps (dernières oeuvres de Schönberg, Bartók, Schnittke ou Lutoslawski) et révèle les liaisons, parfois ténues, qui relient compositeurs d'hier et d'aujourd'hui.
À Robert Parienté, Christoph von Dohnányi résume ce qu'il perçoit de la difficulté et des dangers inhérents aux responsabilités de la direction d'orchestre. "Le métier de chef, affirme-t-il, est une profession très étrange faite de multiples contradictions : c'est en effet une activité où la vérité voisine avec son contraire". La fosse d'opéra, dans la tradition des plus illustres kappellmeister, fut certainement, pour ce chef d'exception, le plus haut lieu d'apprentissage musical, celui-là même qui lui permet de servir les chefs d'oeuvres de sa plus haute probité.