Clément Philibert Léo Delibes, dit Léo Delibes, est un compositeur français du 19e siècle dont les ballets et pièces lyriques sont emblématiques de l’esthétique de la musique française et du romantisme. Il naît dans la Sarthe, dans la commune de Saint-Germain-du-Val, le 21 février 1836, dans une famille favorisant son cheminement musical : mère mélomane (Élisabeth Clémence Batiste), père postier, grand-père maternel chanteur haute-contre de l’Empire (Jean-Matias Batiste), oncle organiste. Ce dernier, Antoine Édouard Batiste, joue un rôle prépondérant dans l’éducation du jeune Léo, après le décès prématuré de son père, alors que l’enfant n’a que 11 ans. Il l’initie notamment à la théorie musicale, ce qui le conduit à entrer au Conservatoire de Paris l’année suivante, alors École Royale de Chant et de Déclamation, rue de Bergère à Paris. Il y étudie la composition sous la tutelle du compositeur Adolphe Adam, ainsi que les claviers (piano, orgue, harmonium). Il y obtient en 1850 un Premier Prix de Solfège. Parallèlement à ses études, Léo Delibes intègre la Maîtrise de la Madeleine, expérience liminaire à son entrée au Chœur de l’Opéra de Paris en tant que chef de chœur. Trois ans plus tard, Léo Delibes devient l’organiste de l’église Saint-Pierre de Chaillot, puis accompagnateur au Théâtre-Lyrique en 1855, à peine âgé de 20 ans. Il compose alors ses premières pièces et assiste à des créations telles que Les Pêcheurs de perles de Bizet. Une dizaine d’années plus tard, il devient chef de chœur second de l’Opéra de Paris, tout en conservant son rôle d’organiste. Il devient à son tour professeur de composition au Conservatoire de Paris, à partir de 1881, et membre de l’Académie des Beaux-Arts deux ans plus tard. En 1872, le musicien s’installe dans les Hauts-de-Seine, à Clichy, avec sa jeune épouse Léontine Denain, née Léontine Estelle Mesnage. Léo Delibes meurt en 1891, à l’âge de 55 ans à Paris et repose au Cimetière de Montmartre.
Léo Delibes et le romantisme
Au cours de ses études, Delibes côtoie Adolphe Adam, musicien et compositeur français émérite que l’on associe bien volontiers au genre du ballet romantique. Léo Delibes propose alors une version étoffée du célèbre ballet Le Corsaire (1856), dont la musique est signée de son professeur, en 1858. De même, il prend part à la composition musicale du ballet La Source, de concours avec le maître austro-hongrois Léon Minkus. Il fait ainsi de premiers pas très remarqués dans le genre du ballet, dont il se fait la nouvelle figure de proue. On lui confie la composition du ballet Coppélia, la fille aux yeux d’émail, plus connu sous le simple titre de Coppélia, d’après un conte d’Hoffmann mettant en scène le Docteur Coppélius et sa poupée mécanique, sur une commande de l’Opéra rue Le Peletier, en 1870. Cette pièce lui rapporte un franc succès auprès du public comme des musiciens, dont notamment Tchaïkovski. Six ans plus tard, son succès se vérifie avec le ballet Sylvia ou la nymphe de Diane, créé à l’Opéra Garnier en tant que premier ballet de l’institution, d’après un livret de Jules Barbier et de Jacques de Reinach et qui fait figurer un chapitre de la mythologie grecque. Avec ces deux œuvres, Delibes transcende le genre musical du ballet, en proposant une pièce musicale à part entière plutôt qu’un simple accompagnement aux variations dansées.
Léo Delibes, maître de la mélodie
Ses activités de chef de chœur et l’influence plausible du métier de tragédienne pour la Comédie-Française de sa belle-mère produisent chez Léo Delibes un attrait particulier pour l’art lyrique, plus particulièrement pour les genres de la mélodie, de l’opéra et de l’opérette. Lorsqu’il rejoint le Théâtre-Lyrique, Léo Delibes propose ses premières compositions à un théâtre voisin, le Théâtre Déjazet, anciennement les Folies-Nouvelles ; en 1856, Deux sous de charbon, Deux vielles gardes, Six demoiselles à marier ; en 1861, Les musiciens de l’Orchestre… Ces œuvres, dont les partitions sont pour certaines perdues, assoient les prémices du succès grandissant de Léo Delibes, dans le genre de l’opérette tout d’abord. En 1874, le musicien compose la mélodie « Les filles de Cadix », d’après un poème d’Alfred de Musset. Son style hispanisant et son aspect théâtral en font l’une des mélodies les plus célèbres du compositeur, parmi la cinquantaine qui nous est parvenue. En 1879 et 1882, sa musique accompagne les répliques des comédiens de la Comédie-Française dans les pièces Ruy Blas et Le Roi s’amuse de Victor Hugo. Il travaille notamment à la reprise de danses anciennes pour accompagner les scènes. Léo Delibes s’illustre enfin dans le genre de l’opéra avec son œuvre la plus célèbre, Lakmé, d’après une nouvelle de Pierre Loti, Le mariage de Loti. Cette œuvre majeure du romantisme français met en scène la fille d’un prêtre de Brahma et un officier britannique, épris l’un de l’autre, dans une histoire d’amour impossible dans les Indes du 19e siècle. Créée à l’Opéra-Comique en 1883, certains de ses airs sont aujourd’hui mondialement connus. La jeune Lakmé est incarnée par une soprano colorature, rôle central dans le répertoire de la tessiture. Son air, « Scène et Légende de la Fille du Paria », est une démonstration tant musicale que vocale dans laquelle se sont illustrées des interprètes émérites telles que Mady Mesplé ou Natalie Dessay. Le « Duo des Fleurs » entre la jeune fille et sa suivante Mallika propose un chant polyphonique bien connu et largement utilisé dans la culture populaire. Outre l’aspect vocal spectaculaire, cet opéra est le fruit de plus de deux années de réflexion et de recherches : le musicien fait ainsi tinter dans sa partition des mélodies, mélismes et procédés d’instrumentation qu’il est allé recueillir notamment en Turquie, dans la lignée d’un courant orientaliste particulièrement favorable aux formes d’exotisme. L’œuvre figure parmi les plus jouées sur les scènes internationales contemporaines. Après ce triomphe, Léo Delibes débute la composition de l’opéra Kassya, dont Jules Massenet contribue à l’orchestration. Cette ultime pièce demeure inachevée.