Quand un Tito Gobbi, acteur prodigieux et chanteur colossal, rencontre une Maria Callas…
À la fois capable de se faire passer pour le débonnaire Falstaff dans l'opéra éponyme de Verdi comme d'endosser le rôle du cruel Scarpia (Tosca de Puccini), Tito Gobbi ne peut heureusement pas dissimuler un timbre qui fait de lui le plus célèbre des barytons des années soixante. On peut en juger avec ce portrait que lui consacre la BBC en 1958.
Accompagné par le London Symphony Orchestra sous la baguette de Charles Mackerras, Tito Gobbi fait défiler dans des décors créés de toute pièce en studio une galerie de personnages : du sombre Iago au paysan madré de Gianni Schicchi, en passant par un petit clin d'œil à ses origines vénitiennes (il est né en 1913 à Bassano) fredonné à la table de maquillage et, bien sûr, Falstaff.
Entre ses études de droit à l'Université de Padoue et une retraite consacrée à la peinture, Tito Gobbi mettra à son répertoire près d'une centaine de rôles, au cours d'une carrière émaillée de disputes avec les directeurs d'opéras du monde entier en raison de ses exigences. Mais unanimement respectés, sa rigueur musicale et ses moyens vocaux ne cèdent en rien, chez lui, à un formidable don d'acteur.
La preuve en est une fois de plus donnée dans ce documentaire que lui consacre la télévision britannique. Avant même d'avoir ouvert la bouche, seul face au miroir, Gobbi se métamorphose pour endosser la personnalité du sinistre Scarpia, son rôle fétiche. Il a abordé ce personnage cinq ans après ses débuts, puis le promènera sur toutes les scènes jusqu'au Met en 1956 où il reçoit un accueil triomphal.
Deux ans plus tard, lors du gala du 19 décembre 1958 au Palais Garnier qui marque les débuts de Maria Callas en France, il donne avec « la divine » le deuxième acte de Tosca sur la scène du Palais Garnier. Gobbi est alors au sommet de ses moyens, ainsi que Callas, qui chante le rôle de Tosca depuis ses dix-neuf ans. Accompagnées par l'Orchestre et les Choeurs de l'Opéra de Paris dirigés par Georges Sébastian, ces deux divas, incomparables chanteurs et acteurs, deviendront au lendemain de cette soirée de légende, un duo incontournable.
Archives :
- Profile in music, BBC archive réalisée par Patricia Foy, 1958;
- La Grande Nuit de l'opéra, INA archive réalisée par Roger Benamou, 1958.