« Il fait partie des grands personnages mythiques, » estime Robert Carsen. « Pour moi, c'est un peu Don Giovanni en plus âgé : il représente tout ce qui se rapporte aux plaisirs de la vie et « Carpe diem » est une maxime qui aurait pu être écrite pour lui, il faut profiter de la vie, » souligne-t-il. Robert Carsen : « À la fin, c'est comme si tout le monde allait manger Falstaff ».
« C'est un tel bonheur d'incarner ce personnage sur scène, » assure le baryton-basse gallois Bryn Terfel qui retrouve là un rôle qui lui colle à la peau : ce chevalier surnommé « Le Ventru » qui pour honorer ses dettes, tente de séduire deux bourgeoises.
Au lieu de réussir à s'emparer de l'argent de leurs maris, son plan tourne court : il devient la risée du village de Windsor avant de triompher finalement. « La musique est très joyeuse et très festive, évidemment, » insiste le metteur en scène, « parce que tout ce qui compte pour Falstaff, c'est de célébrer les plaisirs de la chair, il aime manger et boire, donc on s'est dit que dans chaque scène, il fallait qu'on mange et qu'on boive. Et à la fin, c'est comme si tout le monde allait manger Falstaff, » renchérit-il.
Bryn Terfel témoigne de sa mission quelque peu éprouvante : « Le costume avec le faux ventre, le maquillage, les perruques, les moustaches... C'est lourd à porter pour moi lors de ces soirées. Je peux perdre jusqu'à 5 kilos, » précise-t-il, « à cause de ce four, de ce sauna dans lequel je suis quand je représente cette grandeur sur scène. »
Cette ode à la démesure et à la gloutonnerie est le dernier opéra de Verdi, il a été composé à la toute fin du XIXe siècle.
« J'ai le sentiment que quand il crée ses opéras, il a toujours un regard moderne, un peu comme Rodin qui modèle son travail et qui essaie sans cesse de le façonner, d'en entamer un autre et de lui donner une forme, » juge Robert Carsen. « Il est très rude dans son approche du travail sauf dans Falstaff où il est dans la finesse : c'est vraiment une œuvre exceptionnelle et peut-être qu'il a décidé de la créer parce qu'il savait qu'il ne serait pas capable d'écrire une autre pièce comme celle-là, » suppose-t-il.
« Qui d'autre a conclu un opéra sur une fugue ? » s'exclame le baryton-basse avant d'ajouter : « C'est l'un des passages musicaux les plus forts de cette œuvre. »
« C'est fou de penser, » poursuit-il, « que c'est le final d'une pièce composée par un homme âgé que Rossini avait mis au défi en lui disant : « Jamais vous n'écrirez un opéra comique » et quel opéra comique il a écrit !"s'émerveille-t-il.