Bien loin du tragique et de l'héroïsme qui font parfois la mauvaise réputation de l'opéra, Falstaff se distingue par le comique de son livret, amplifié ici par la mise en scène délicieusement moqueuse de Richard Jones et par le jeu d'acteur des chanteurs, Christopher Purves et Marie-Nicole Lemieux en tête. Dans Falstaff, aucun air de bravoure comme chez un Puccini ou un Bellini, ou encore comme dans d'autres opéras de Verdi lui-même. C'est une œuvre parfaitement fluide, où la musique ne prime pas sur l'action, mais où elle vient au contraire la supporter et la propulser au rang de chef-d'œuvre.
Le comique dans Falstaff
Tout porte à rire dans Falstaff. Tout d'abord, les grands thèmes qui la pétrissent (travestissement et vengeance) laissent présager du comique dans lequel l'œuvre peut basculer. Les mots qu'Arrigo Boito place dans la bouche de Falstaff, ensuite, prêtent à faire du personnage un véritable bouffon, que sa condition physique n'aide pas. Le comique de situation enfin, généré par les mises en abyme, les mensonges, les quiproquos, les rebondissements et les pièges tendus par les personnages, contribuent à faire de Falstaff une pièce hilarante face à laquelle le public de Glyndebourne n'est pas avare de rires...
Sir John Falstaff, héros vulgaire d'un opéra éponyme ?
Inspiré des Joyeuses Commères de Windsor de Shakespeare (on sait à quel point le compositeur tenait le poète en estime), Falstaff met en scène un homme monstrueux de vanité, de laideur, de cynisme et de bêtise. Verdi nous joue un tour en baptisant son opéra du nom de son personnage principal. Car les véritables héroïnes dans Falstaff, ce sont les femmes, impitoyables, organisées en gang. Elles sont à l'origine des multiples intrigues de l'œuvre, initient les quiproquos, posent les pièges et mènent les vengeances, à la fois contre ce Falstaff lubrique et contre l'autorité maritale. La morale de cette histoire, c'est la malicieuse Mrs Quickly qui la formule : « La femme naît rusée » (« La donna nasce scaltra »).